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La multiplication des incubateurs et des structures pour accompagner les startups de la e-santé témoigne de la dynamique du secteur. Cet écosystème se développe avec des ambitions à l’international.
Toutefois, les startups dédiées aux 20 500 pharmacies françaises semblent bien invisibles dans ces lieux d’innovations. Les nombreuses solutions innovantes destinées au réseau de dispensation et d’accompagnement des patients restent circonscrite au secteur, témoignant du manque de maturité numérique de celui-ci.
Un éventail large de startup e-santé
De nombreuses infographies illustrent l’abondance des solutions, notamment celles employant des solutions d’IA et au service du parcours patient.
Le potentiel du numérique sur l’ensemble de la chaîne de valeur de la santé n’est plus à démonter. Le financement des innovations en santé n’est pas un frein notamment depuis la crise sanitaire. La BPI par exemple dispose de fonds Patient Autonome et intervient en facilitateur de l’investissement direct. A horizon 2024, ce sont 1,8 milliards qui devraient être investis dans le secteur de la santé.
Toutefois, le modèle économique de la e-santé reste fragile.
La viabilité économique des startups repose sur des problématiques fort diverses selon leurs activités. L’accès au remboursement pour les thérapies digitales, l’adhésion et les changements d’usages pour celles s’adressant aux professionnels de santé ou encore la valeur ajoutée perçue par les patients lorsqu’ils financent directement un service de santé…
Pour accompagner la recherche du bon modèle, ces startups ont à leur disposition un écosystème très riche.
Une palette très large d’incubateurs et accélérateurs pour les startups de la e-santé
Les structures de recherche et hospitalières ont été pionnières dans la formalisation de lieux facilitant les partenariats entre les établissements de recherche ou de soins publics et le privé. La plus emblématique, Eurasanté, l’agence de développement économique de la région des Hauts-de-France, a accompagné 1 100 entreprises en Santé, Nutrition et SilverEco dont 260 projets au sein du Bio incubateur, Bio accélérateur Eurasanté. Avec le soutien de la région Ile de France, on peut citer Vallée Bio Parc, Tech Care Paris Tech&Co à Boucicaut ou iPEPS à l’Institut du Cerveau – ICM qui incubent ou accompagnent la croissance des startups spécialisées en santé.
Les réseaux d’incubateurs plus généralistes s’intéressent également à la santé comme la filiale du Crédit Agricole Le Village by CA et ses 33 agences locales ou le réseau 1Kubator présent dans 10 villes en France et en Afrique.
En parallèle, des acteurs privés développent l’écosystème e-santé sur le versant des relations avec les grands groupes, les industriels de la santé et les établissements de soin. Le modèle repose sur des programmes clef en main d’open innovation. Comme le Digital Pharma Lab qui propose différents programmes d’accompagnement et lance son 3eme appel à candidature (Coalition Next-2022) sur des thématiques d‘optimisation de la pratique médicale, d’amélioration de la prise en charge du patient ou d’autonomisation du patient.
Enfin, un nouveau type d’organisation mise sur la complémentarité des fondateurs. Ces consortium pluridisciplinaires ambitionnent également de contribuer à l’essor de solutions innovantes en santé. Futur4Care, société créée en juin 2021, réunit Sanofi, Capgemini, Generali et Orange pour devenir le hub européen de référence en e-santé C’est à la fois un institut, en tant que lieu d’échange et de diffusion de connaissances en santé numérique et data, et aussi un accélérateur dont l’ambition est d’accompagner 150 startups de la e-santé, d’ici 2025, dans leur développement jusqu’à atteindre leur marché. Pour les accueillir, le BioPark, un plateau de 6 400m2, a été inauguré fin décembre à Paris. Le premier appel à projet lancé en septembre 2021 se concentre autour de deux thèmes : la prise en charge du patient à distance grâce aux nouvelles technologies et la médecine personnalisée (du diagnostic jusqu’au traitement). Enfin, Futur4Care annonce, dans ses objectifs, créer un label de référence autour de la data.
Le campus national de la e-santé
Dernier arrivé et non des moindres, le groupement d’intérêt scientifique PariSanté Campus a été inauguré fin 2021 pour investir principalement le champ de la recherche et de la formation. Ces 15 000m2 doivent devenir la vitrine de la e-santé en France. Le ministère de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation en lien avec le ministère des Solidarités et de la Santé porte le programme. Doté d’une enveloppe de 15 millions d’euros du plan France Relance et du support de 5 opérateurs publics (Inserm, université Paris Sciences & Lettres, Inria, Health Data Hub, et l’Agence du numérique en santé), PariSanté Campus a dévoilé sa 1ère promotion de 60 startups e-santé.
Sources : PariSante Campus
Bientôt la maturité pour la e-santé en France ?
Au niveau national, l’Espace Numérique de santé (ENS, voir cet article) se positionne comme le lieu de convergence des acteurs de santé autour du patient. Pour les startups, se conformer aux référentiels techniques, éthiques et d’interopérabilité pour intégrer le kiosque d’applications de l’ENS va nécessiter des investissements et des ressources supplémentaires. Ainsi, de manière indirecte, l’ENS va mettre en avant les startups et éditeurs de solutions qui auront fait cet effort et répondront au niveau élevé d’exigences de l’Agence du Numérique en Santé (Outil Convergence de l’ANS). Le process de référencement se veut vertueux pour les utilisateurs finaux, qu’ils soient patients ou professionnels de santé. Pour les startups, on peut imaginer qu’être « labellisé Mon Espace Santé » devienne un gage de fiabilité et de robustesse, et surtout un levier de valorisation.
Autre signe que le marché se structure, des initiatives visent à fédérer plusieurs solutions autour d’une problématique, une aire thérapeutique ou un parcours patient.
La dernière en date regroupe sept solutions en santé mentale autour du collectif MentalTech.
Qare, hypnoVR, Kwit, mindDay, PetitBamBou, ResilEyes Therapeutics et Tricky signent un manifeste autour de trois axes : inscrire la santé mentale dans le débat public, démocratiser et accélérer les usages et fédérer l’ensemble des acteurs de la e-santé mentale.
On peut alors s’interroger sur la maturité des acteurs adressant le marché officinal.
A ce jour, l’offre est certes large avec plus d’une cinquantaine de solutions. Mais cette offre reste éclatée, peu structurée et difficilement identifiable.
Leur présence sur les médias sociaux professionnels leur permet de s’adresser aux industriels ou aux groupements. Tandis que les salons professionnels, tel que Pharmagora et son village e-santé, apportent de la visibilité auprès des congressistes, donc essentiellement auprès des pharmaciens.
Face au constat d’une portée relativement limitée de ce type d’action, est-il pertinent que les solutions dédiées au réseau officinal se fédèrent ?
A court terme, cela pourrait répondre aux importants enjeux de l’ensemble de l’écosystème officinal :
- Faire connaître les innovations du secteur et valoriser leur impact en communicant auprès des pharmaciens, groupements, fournisseurs et institutionnels
- Accroitre leur proposition de valeur par la complémentarité des solutions,
- Rassembler les acteurs du digital et de l’innovation autours des sujets réglementaires, technologiques et d’usages communs et spécifiques au secteur.
Une partie de ces startups sont en effet au cœur des sujets majeurs comme le déploiement de Mon Espace Santé, la pression commerciale des pharmacies européennes ou l’essor des nouveaux usages numériques des patients. La transformation numérique du réseau officinal se fera en s’appuyant sur les expertises de ce vivier d’innovation.
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